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1 Introduction Les Ãtats-Unis disposent dâune industrie forte, dynamique et respectée au ni- veau international dans les domaines de la science, lâingénierie et la médecine. Ces domaines offrent des carrières enrichissantes et stimulantes dans lesquelles les femmes sont de plus en plus nombreuses. Heureusement, au cours des dernières décennies, de nouvelles initiatives menées dans les établissements et les universités de notre pays ont réussi à améliorer le recrutement, le maintien et la promotion des femmes dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine. Ces ef- forts montrent des signes dâamélioration en faveur de la diversité des sexes, puisque les étudiants en sciences de la vie et en médecine atteignent la parité1, et soulignent que les programmes dâingénierie de certains campus connaissent une croissance significative des inscriptions des femmes2. (Cosentino et Banerjee 2017). Mais ces gains sont menacés. Alors que les femmes sont de plus en plus 1â2014, le pourcentage de femmes ayant obtenu une licence en ingénierie, en informatique et en physique était dâenviron 20%. Ce chiffre était à peu près identique, ou légèrement inférieur pour les doctorats, dans ces domaines. En mathématiques et en statistiques, lâéquilibre entre les sexes est légèrement meilleur, avec environ 40-42% pour les licences et les masters, mais seulement 24% pour les doctorats. Dans les sciences biologiques, au moins 50% des femmes obtiennent des licences depuis 1995, et depuis 1997 pour les doc- torats (NSF 2017). 2ââ Voir https://www.washingtonpost.com/local/education/women-break-barriers-in-en- gineering-and-computer-science-at-some-top-colleges/2016/09/16/538027a4-7503-11e6- be4f-3f42f2e5a49e_story.html? utm_term=.6922f69239e7 and http://news.mit.edu/2017/ closing-the-gender-gap-in-mit-mechanical-engineering-0731.
20 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES présentes dans ces domaines, elles sont confrontées à des préjugés et à des obstacles qui entravent leur participation et leur ascension professionnelle dans les sciences, lâingénierie et la médecine. Comme dans dâautres domaines histo- riquement dominés par les hommes, que ce soit dans le milieu universitaire ou non, le harcèlement sexuel demeure lâun des obstacles les plus répandus. Le harcèlement sexuel est une forme de discrimination qui comprend le harcèlement sexiste (comportements verbaux et non verbaux qui traduisent un sentiment dâhostilité, visent à objectifier, exclure ou rabaisser les membres dâun sexe), les attentions sexuelles non désirées (avances sexuelles verbales ou physiques, non désirées, qui peuvent inclure des agressions) et la coercition sexuelle (lorsque des faveurs professionnelles ou scolaires sont conditionnées par une activité sexuelle). Au cours des 30 dernières années, le taux du har- cèlement sexuel dans les différents secteurs dâactivité est resté stable, mais, aujourdâhui, le nombre de femmes qui travaillent dans les universités ou les fréquentent, ainsi que dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine â en tant quâétudiantes et professeures â, de sorte que davantage de femmes sont victimes de harcèlement sexuel dans le cadre de leur travail et de leurs études. Les affaires de harcèlement sexuel qui ont fait la une des journaux ont montré à quel point ce comportement discriminatoire est répandu dans notre société. Des femmes, qui ont gardé le silence pendant des années, se mani- festent aujourdâhui et font part de leurs expériences de harcèlement sexuel, quâil sâagisse de propos obscènes ou dénigrants, de plaisanteries hostiles ou dégradantes, de sabotage professionnel, dâattentions sexuelles répétées et im- portunes, dâavances, de demandes de faveurs sexuelles et dâautres agissements ou propos offensants et discriminatoires. Le monde universitaire nâa pas été épargné par ces gros titres et ces révélations publiques, comme en témoignent les reportages hebdomadaires dans les médias spécialisés de lâenseignement supérieur et le hashtag #MeToo, utilisé par de nombreuses professeures et étu- diantes dâétablissements supérieurs, et dâuniversités, pour partager leurs expé- riences sur les réseaux sociaux. Certaines des affaires de harcèlement sexuel les plus médiatisées dans le monde universitaire ont été relevées dans les domaines de la science, lâingénierie et la médecine.3 Rien quâen 2017, plus de 97 accusa- 3ââ Voir http://www.scientificamerican.com/article/astronomers-struggle-to-translate-an- ger-into-action-on-sexual-harassment/; http://www.nytimes.com/2014/11/15/us/yale-me-
1. Introduction 21 tions de harcèlement sexuel dans des établissements dâenseignement supérieur ont été rapportées dans les médias4, et il est fort probable que beaucoup dâautres allégations fassent lâobjet dâun processus de signalement officiel et confidentiel. Les recherches menées dans le cadre de ce rapport montrent que les en- vironnements universitaires en science, ingénierie et médecine présentent des caractéristiques qui favorisent considérablement le risque que des faits de har- cèlement sexuel ne soient perpétrés. Lâenseignement supérieur, actuellement et historiquement, est â et a été â un milieu dominé par les hommes, qui, dans la plupart des cas, occupent des postes de pouvoir et dâautorité. Lâenseignement supérieur est perçu, bien souvent avec beaucoup de justesse, comme tolérant à lâégard du harcèlement sexuel. En outre, la structure de lâenseignement supé- rieur est hiérarchique, et les relations entre les professeurs et les stagiaires (par exemple, les étudiants, les boursiers postdoctoraux, les internes) sont très dépen- dantes. Enfin, le milieu universitaire implique souvent de travailler ou dâétudier dans des environnements qui isolent, particulièrement dans les domaines de la science, lâingénierie et la médecine. Les recherches ont constamment montré que les institutions à prédominance masculine â et dont les hommes occupent des postes qui peuvent directement influencer les choix de carrière des femmes qui leur sont subordonnées â montrent des taux plus élevés de harcèlement sexuel (USMSPB 1995, Fitzgerald et al. 1997, Berdahl 2007b, Willness, Steel et Lee 2007, Schneider, Pryor et Fitzgerald 2011). Lâinégalité entre les sexes et les différences de pouvoir qui en résultent, entre les hommes et les femmes sur les campus universitaires, existent depuis des années, et bien que certains do- maines et institutions aient fait des progrès pour combler cet écart, celui-ci per- siste. Non seulement les femmes sont moins nombreuses que les hommes dans la plupart des domaines scientifiques, dâingénierie et médicaux (au niveau des étudiants de premier et de deuxième cycle, des stagiaires postdoctoraux et des professeurs), mais les hommes détiennent également davantage de postes de dical-school-sexual-harassment. html; http://www.sciencemag.org/news/2016/01/ caltech-suspends-professor-harassment-0; http://www. nytimes.com/2016/02/03/us/chica- go-professor-resigns-amid-sexual-misconduct-investigation.html; and http://www.scien- cemag.org/news/2016/02/sexual-misconduct-case-has-rocked-anthropology. 4ââVoir https://geocognitionresearchlaboratory.wordpress.com/2016/02/03/not-a-fluke-that- case-of-sexual-harassment-is-not-an-isolated-incident/.
22 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES pouvoir dans le milieu universitaire.5 La plupart des directeurs de département et des doyens sont des hommes. La plupart des chercheurs principaux sont des hommes. La plupart des doyens et des présidents sont des hommes (ACE 2017). Cela ne veut pas dire que tous les hommes â ni même la plupart dâentre eux â commettent des faits de harcèlement sexuel, mais que le fait que les postes de direction soient majoritairement occupés par des hommes peut entraîner â et a entraîné â une minimisation, des réactions limitées et un manque de prise au sérieux de la question du harcèlement sexuel ou dâincidents spécifiques. Ainsi, cette sous-représentation des femmes dans les domaines de la science, de lâingénierie et de la médecine, et aux postes de direction dans ces domaines, engendre un environnement à haut risque pour le harcèlement sexuel, qui peut produire des effets délétères sur les études et la carrière des femmes. Les recherches montrent également que le plus grand facteur de prédiction de lâoccurrence du harcèlement sexuel est, de loin, le climat organisationnel dans une école, un département, un programme, ou dans lâensemble dâun éta- blissement. Le climat organisationnel en matière de harcèlement sexuel (éga- lement appelé perception de la tolérance organisationnelle) est évalué en fonc- tion de trois éléments : (1) le risque perçu pour les personnes qui signalent les faits de harcèlement sexuel, (2) lâabsence de sanctions contre les délinquants et (3) la perception selon laquelle le fait de signaler un comportement de har- cèlement sexuel ne sera pas pris au sérieux. Dans les environnements qui sont perçus comme plus tolérants ou permissifs à lâégard du harcèlement sexuel, les femmes sont plus susceptibles dâêtre directement harcelées (Fitzgerald et al. 1997, Williams, Fitzgerald et Drasgow 1999) et dâêtre témoins du harcèlement dâautrui (Glomb et al. 1997). De même, un environnement qui ne tolère pas le harcèlement, et/ ou dont les conséquences de ces agissements sont fortes, claires et transparentes, peut réduire de manière significative la probabilité que le harcèlement sexuel ne soit perpétré, même par des personnes qui sont plus susceptibles de commettre ces méfaits. Outre ces facteurs de risque, il existe également des conditions sur le cam- 5âââ Dans une enquête réalisée en 2013â2014 auprès des professeurs de premier cycle, 11,1% des hommes étaient directeurs de département et 2,4% doyens, contre 8,4% des femmes qui occupaient des postes de directrices de département et 1,9% de doyennes (Eagan et al. 2014).
1. Introduction 23 pus qui exacerbent le problème, notamment les suivantes : ⢠lâattention portée à ce sujet par les responsables de campus â notam- ment les président·e·s, les doyen·ne·s, les recteurs et rectrices et la direction de département â est insuffisante ; ⢠lâabsence de politiques et de procédures claires sur le campus et dans les départements, qui précisent clairement que toutes les formes de harcèlement sexuel, y compris le harcèlement sexiste, ne seront pas tolérées, que les enquêtes seront prises au sérieux et que le non-respect des réglementations seront sanctionnées de manière significative ; ⢠le respect minimal, ou simplement symbolique, de la loi, sans se sou- cier de savoir si les politiques empêchent réellement le harcèlement et les représailles ; ⢠le manque de protection des victimes du harcèlement sexuel, qui souffrent souvent des conséquences induites lorsquâelles signalent les faits ; ⢠lâabsence de formation efficace sur le harcèlement sexuel. Si presque tous les établissements proposent une forme de « formation au harcè- lement sexuel » et exigent souvent que tous les étudiant·e·s, profes- seur·e·s et membres du personnel suivent cette formation, celle-ci est rarement évaluée et révisée pour sâassurer quâelle produit les effets souhaités en matière de réduction et de prévention du harcèlement ; ⢠lâévaluation du problème du harcèlement sexuel en fonction du nombre de cas officiellement signalés à lâinstitution, plutôt que par le biais dâenquêtes sur le climat ambiant régulières ; ⢠un manque dâattention porté à lâégard dâun climat qui tolère le harcè- lement sexiste, ce qui augmente les chances que dâautres formes de harcèlement sexuel se produisent. Heureusement, il y a des raisons dâêtre optimiste quant à la possibilité de re- médier à cette problématique sur les campus et dans les domaines de la science, lâingénierie et la médecine, et de réduire et de prévenir le harcèlement sexuel. De plus en plus de campus adoptent des politiques et des stratégies qui sâat- taquent au problème en se concentrant sur le changement de la culture et du cli- mat dans leurs départements, leurs écoles et leurs programmes, ainsi que dans lâensemble de lâinstitution, créant ainsi des environnements où le harcèlement sexuel est moins susceptible de se produire. Leurs intentions sont de (1) créer
24 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES des environnements qui sont diversifiés, inclusifs et respectueux, (2) de diffuser la structure du pouvoir et réduire lâisolement, (3) de soutenir les victimes du harcèlement sexuel et leur offrir des options permettant de faire face au harcè- lement sexuel, (4) de démontrer que les comportements de harcèlement sexuel sont inacceptables et (5) tenir pour responsables les auteurs de ces faits. Par exemple, comme nous le verrons dans ce rapport, de nombreuses institutions, écoles et départements prennent les mesures suivantes : ⢠modifier les processus de recrutement, de promotion et dâadmission permettant de valoriser et soutenir la diversité, lâinclusion et les com- portements respectueux ; ⢠renforcer et évaluer les formations existantes sur le harcèlement sexuel, et compléter ces formations par des formations à lâinterven- tion des témoins ; ⢠modifier des structures de financement et dâencadrement des stagiaires afin de réduire le déséquilibre de pouvoir entre eux et le corps ensei- gnant ; ⢠développer des politiques et des procédures qui donnent aux victimes de harcèlement la possibilité de parler avec des journalistes, sans y être obligés, et dâexercer un plus grand contrôle sur la manière dont, et le moment où, ils traitent leur cas de harcèlement ; ⢠développer des compétences de leadership, visant à renforcer les ca- pacités ⢠des dirigeants des campus avec les outils dont ils ont besoin pour lutter contre le harcèlement sexuel ; ⢠en faisant connaître les politiques de lutte contre le harcèlement en montrant que les individus sont tenus pour responsables lorsquâil sâavère quâils ont violé les réglementations, et montrer ainsi, claire- ment, que le harcèlement sexuel nâest pas toléré. Si le harcèlement sexuel est un sujet qui peut être traité par un changement systémique de la culture et du climat des établissements dâenseignement supé- rieur, il est possible dâen faire bénéficier non seulement les femmes, mais aussi les hommes et dâautres groupes sous-représentés, et, à terme, les entreprises scientifiques, dâingénierie et médicales. Pour parvenir à un tel changement sys- témique, il faut identifier ce qui fonctionne, et ce qui ne fonctionne pas, dans notre système actuel et penser de manière créative, et peut-être non convention-
1. Introduction 25 nelle, afin de proposer de nouvelles perspectives et des solutions fondées sur des preuves à un problème qui persiste depuis plusieurs décennies. ÃNONCà DES TÃCHES Les National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine se préoc- cupent depuis longtemps des inégalités femmes-hommes dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine, tant parmi les étudiants que parmi le personnel. Le Comité des académies nationales sur les femmes en sciences, ingénierie et médecine (CWSEM) a été créé en 1991 pour étudier ces inégalités et envisager des moyens de le combler. Au cours des travaux menés ces der- nières années, le CWSEM sâest alarmé du fait que les efforts proactifs visant à accroître la participation et le leadership des femmes dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine pourraient être sapés par lâexistence du harcèlement sexuel dans le milieu universitaire. Le comité a choisi de sâat- taquer à cette problématique au moyen dâune étude. En 2016, sous lâégide du CWSEM, les National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine ont créé un comité dâétude spécial composé de chercheur·e·s, de dirigeant·e·s dâétablissements supérieurs et dâentreprises, et dâautres expert·e·s en la matière, afin dâétudier la question et la manière dont on peut lutter contre le harcèlement sexuel. Lâétat dâavancement des travaux du comité dâétude était le suivant : Entreprendre une étude sur lâinfluence du harcèlement sexuel dans le milieu universitaire sur la promotion professionnelle des femmes dans les domaines scientifique, technique et médical. Lâétude comprendra les éléments suivants : ⢠Lâexamen de la recherche sur la mesure dans laquelle les femmes dans les domaines de la science, lâingénierie et la médecine sont victimes de harcèlement sexuel sur les campus des établissements supérieurs et des universités, dans les laboratoires de recherche et les sites de recherche, dans les hôpitaux/centres médicaux et dans dâautres environnements universitaires ; ⢠lâexamen des informations existantes sur la mesure dans laquelle le harcèlement sexuel dans le milieu universitaire a un impact négatif sur
26 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES le recrutement, le maintien et la promotion des femmes qui poursuivent des carrières scientifiques, techniques, médicales et dâingénierie, avec des données comparatives provenant dâautres secteurs, tels que lâarmée, le gouvernement et le secteur privé ; ⢠lâidentification et lâanalyse des politiques, stratégies et pratiques qui ont été les plus efficaces pour prévenir et traiter le harcèlement sexuel dans ces contextes. Sâappuyant sur des statuts juridiques et sur les travaux de chercheur·e·s en droit et en sciences sociales, le comité dâétude a fondé ses travaux sur les défi- nitions suivantes : Le harcèlement sexuel (une forme de discrimination) se compose de trois formes de comportement : (1) le harcèlement sexiste (comportements verbaux et non-verbaux qui traduisent un sentiment dâhostilité, visant à objectifier, exclure ou rabaisser les membres dâun sexe), (2) les attentions sexuelles non désirées (avances sexuelles verbales ou physiques, non désirées, qui peuvent inclure des agressions) et (3) la coercition sexuelle (lorsque des faveurs sur le plan professionnel ou scolaire sont conditionnées par une activité sexuelle). Le harcèlement peut être soit direct (visant un individu en particulier), soit ambiant (harcèlement généralisé dans un environnement). Ces définitions et explications sont données plus en détail au chapitre 2. En examinant lâénoncé des tâches, nous avons déterminé que la recherche sur les pratiques et les procédures les plus appropriées et les plus équitables pour enquêter, et statuer, sur les rapports de harcèlement sexuel allait au-delà du champ des missions que nous nous étions fixées. Nous avons conscience quâil sâagit dâun sujet crucial et complexe et les institutions ont exprimé le sou- hait dâêtre guidées. Cependant, nous ne pouvions lâexaminer de manière aussi détaillée que nécessaire dans la mesure où certaines tâches étaient hors de notre champ dâaction et de notre expertise. DÃFINIR LA POPULATION Cette étude examine les expériences des femmes sur les campus, et en de- hors des campus, dans le cadre de leurs activités scientifiques, dâingénierie et de médecine sur le terrain, dans les centres médicaux universitaires, sur les
1. Introduction 27 navires de recherche océanique et dans le cadre de stages et de collaborations. Nous avons interprété notre accusation comme incluant le harcèlement sexuel à la fois dans un cadre éducatif et dans un cadre professionnel, et nous prenons donc en compte les expériences des étudiantes de premier et deuxième cycle, des candidates à un postdoctorat et autres stagiaires dans lâenseignement su- périeur, des professeures à tous les niveaux, des employées (câest-à -dire des employées dans le domaine scientifique) et de celles qui travaillent dans les centres médicaux universitaires, notamment les professeures, les stagiaires, les docteures, etc. Nous avons identifié les femmes de couleur, les membres des communau- tés LGBTQIA+6, ci-après dénommés « individus appartenant aux minorités sexuelles et de genre », les personnes handicapées et les personnes qui ont émigré, ou qui ont immigré, aux Ãtats-Unis sont des populations importantes à considérer plus en détail parce quâelles sont simultanément désavantagées par lâintersection de leurs positions subordonnées par leur origine raciale, ethnique, la sexualité, leurs capacités physiques et mentales et leur statut dâimmigration, et quâelles sont souvent confrontées à des mécanismes supplémentaires dâop- pression, de domination ou de discrimination. Pour mieux comprendre com- ment ces positions façonnent le vécu et les expériences de harcèlement sexuel des femmes, nous avons utilisé le concept dâintersectionnalité et, tout au long du rapport, nous avons examiné les quelques recherches disponibles sur les expériences de ces femmes. TRAVAIL RÃALISà PAR LE COMITà DâÃTUDE En étudiant de plus près la prévalence, la nature et lâimpact du harcèlement sexuel dans le champ des sciences, de lâingénierie et de la médecine, le comité dâétude a examiné les sujets et problématiques suivants : ⢠taux de prévalence et caractéristiques du harcèlement sexuel dans le cadre professionnel et universitaire et, plus spécifiquement, dans le champ des sciences, de lâingénierie et de la médecine ; 6ââ Lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres, queer, intersexués, asexuels, non-binaires et non conformes au genre.
28 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES ⢠influence des structures organisationnelles en sciences, ingénierie et médecine universitaires ; ⢠environnements uniques dans le champ des sciences, de lâingénierie et de la médecine qui peuvent se prêter ou être susceptibles de tolérer ce genre de comportements ; ⢠répercussions immédiates et conséquences sur la carrière profession- nelle en sciences, ingénierie et médecine ; ⢠prise en compte des expériences de harcèlement sexuel au moyen dâun cadre intersectionnel. Dans la mesure du possible, le rapport cite les études scientifiques les plus récentes sur un sujet donné. Cela dit, la recherche empirique sur le harcèlement sexuel, utilisant des méthodes scientifiques rigoureuses, remonte aux années 1980. Ce rapport cite les conclusions des travaux antérieurs lorsque ces ré- sultats révèlent des tendances ou des schémas historiques au fil du temps. Il cite également les résultats dâétudes antérieures lorsquâil nây a aucune raison théorique de sâattendre à ce que les résultats aient changé avec le temps. Par exemple, la relation inversement proportionnelle entre le harcèlement sexuel et lâépanouissement au travail est solide : plus une personne est harcelée au travail, moins elle aime son travail. Ce constat de base nâa pas changé en trente ans et il nây a aucune raison de sâattendre à ce quâil change. Lorsque lâon examine les politiques, stratégies et pratiques en matière de prévention et de lutte contre du harcèlement sexuel, les membres de la com- mission ont étudié les recherches sur la formation, les politiques et les procé- dures institutionnelles, et les obligations légales des institutions. Nous avons également examiné les structures nationales qui traitent le harcèlement sexuel, y compris les politiques et les processus fédéraux en matière dâinconduite dans la recherche, les systèmes interinstitutionnels et des agences fédérales de si- gnalement, prévention et réponse au harcèlement sexuel, ainsi que le rôle des associations et organisations professionnelles nationales et internationales dans le traitement de ces questions. Pour recueillir des informations sur ces sujets, notre comité a tenu une pre- mière réunion du comité, trois ateliers publics et un quatrième groupe de dis- cussion virtuelle en 2017. La première réunion du comité sâest tenue virtuelle- ment le 10 février. Le premier atelier public a eu lieu le 28 mars à Washington, le deuxième, le 20 juin à Irvine, en Californie, le troisième le 4 octobre à Bos-
1. Introduction 29 ton, au Massachusetts, et le panel virtuel sâest tenu le 25 octobre. TRAVAIL DÃLÃGUà Nous avons également commandé plusieurs études pour compléter les do- maines où des lacunes dans la recherche ont été identifiées. Le travail le plus important, qui a été commandé, est une étude de recherche qualitative qui a été développée par RTI International, avec les conseils de notre comité, pour com- prendre lâinfluence du harcèlement sexuel sur lâavancement de la carrière des femmes en sciences, ingénierie et médecine, en particulier dans lâenseignement supérieur et les milieux médicaux. Les résultats de cette recherche illustrent lâimpact personnel et professionnel que le harcèlement sexuel a eu sur la vie de ces femmes. Pour comprendre ces expériences complexes, sensibles et subjectives, et leurs impacts, nous avons choisi dâutiliser la méthode la plus adaptée à la com- préhension de ces questions : une étude qualitative consistant en des entre- tiens individuels semi-structurés. Lâenquête qualitative est largement reconnue comme la méthode de choix pour générer un aperçu des phénomènes com- plexes, des contextes dans lesquels ils se produisent et de leurs conséquences (Creswell 2013). Ces méthodes sont considérées comme particulièrement bien adaptées pour mettre au premier plan et éclairer les expériences et les percep- tions de ceux qui sont considérés comme des victimes et dâautres individus dont les points de vue ont été peu exprimés, ou dont les expériences atten- dues ont peu de précédents dans les recherches antérieures (Sofaer 1999). Cette recherche nâest pas destinée à fournir des informations sur la prévalence du harcèlement sexuel ou sur la fréquence de ces expériences ; elle vise plutôt à illustrer comment les conséquences sur la carrière et la santé, identifiées par la recherche quantitative, sont réellement vécues dans les domaines de la science, lâingénierie et la médecine universitaires. Lâétude qualitative du RTI a consisté en 40 entretiens individuels semi-struc- turés avec des professeures de sciences, dâingénierie et de médecine qui ont été victimes de harcèlement sexuel. Pour recruter les participants, le RTI a utilisé les données du formulaire web et a ensuite examiné les réponses pour délibé- rément sélectionner les personnes à interviewer parmi les personnes éligibles, afin de garantir la représentation des femmes de couleur et des femmes apparte-
30 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES nant à des minorités sexuelles et de genre, des femmes de toutes les catégories, sous-catégories â à différents stades de leur carrière â des femmes de diverses régions géographiques (dans le but de représenter aussi bien les femmes des ré- gions les plus conservatrices comme les plus libérales du pays) et des personnes qui ont, ou non, fait part de leurs expériences à lâinstitution et qui ont, ou non, séjourné dans lâinstitution où ces expériences ont eu lieu. Sur les 340 femmes qui ont rempli lâoutil de sélection, 65 ont été jugées éligibles, 48 ont été contac- tées pour des entretiens et 40 ont terminé les entretiens. Les entretiens téléphoniques semi-structurés ont duré environ 1 heure et les questions posées étaient spécifiques, ce qui, selon les recherches, est la méthode la plus fiable pour recueillir des informations sur ce sujet (Bastian, Lancaster et Reyst 1996). Les questions portaient sur les sujets suivants : ⢠compréhension du harcèlement sexuel (par exemple, les expériences considérées comme constituant des faits de harcèlement sexuel) ; ⢠historique des expériences de harcèlement sexuel sur le lieu de travail sur ces cinq dernières années ; ⢠les réponses à ces expériences (par exemple, divulgation, réponse in- terne, changements dans la vie professionnelle, procédures formelles de signalement) ; ⢠lâimpact perçu du harcèlement sexuel sur le travail et le déroulement de la carrière ; ⢠des idées sur ce qui pourrait être fait pour mieux prévenir ou répondre à de tels incidents. Les enregistrements de tous les entretiens ont été transcrits de manière pro- fessionnelle, et les renseignements de base (tels que le nom et le lieu des répon- dantes et les institutions où elles travaillaient) ont été supprimés lors de la pré- paration des transcriptions. Puis celles-ci,, dépersonnalisées, ont été analysées à lâaide dâATLAS.ti, un logiciel dâanalyse qualitative des données. Un livre de codes a été élaboré conjointement par lâéquipe dâanalyse, incorporant des codes déductifs basés sur les questions de recherche de lâétude et des codes inductifs pour saisir les thèmes qui sont apparus au cours du processus de codage et dâexamen des données. Les résultats de lâétude qualitative du RTI sont utilisés tout au long du rap- port pour illustrer les expériences des femmes victimes de harcèlement sexuel dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine universitaires.
1. Introduction 31 Le document complet décrivant lâétude et ses résultats est disponible à lâannexe C du présent rapport. En utilisant les données dâARC3, lâAdministrator Researcher Campus Cli- mate Collaborative, nous avons demandé à Kevin Swartout, de lâUniversité dâÃtat de Géorgie, de rédiger un rapport sur lâincidence du harcèlement sexuel au sein du système de lâUniversité du Texas et de distinguer les expériences des personnes travaillant dans les sciences, lâingénierie et la médecine de celles des autres disciplines. Des données complémentaires fournies par le système uni- versitaire de lâÃtat de Pennsylvanie ont été incluses pour donner une image plus large. Lâanalyse complète de K. Swartout est disponible à lâannexe D. Enfin, afin dâéclairer la rédaction du présent rapport, les économistes Elena Stanca- nelli et Shoshana Grossbard ont été chargées dâexaminer les recherches sur les coûts économiques du harcèlement et de la discrimination sexuels en général et dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine universitaires. ORGANISATION DU RAPPORT Le chapitre 2 examine les recherches sur le harcèlement sexuel, en précisant ce qui constitue le harcèlement sexuel, sa fréquence, son mode dâapparition et les caractéristiques des environnements qui favorisent le harcèlement sexuel. Ce chapitre sâappuie sur des recherches menées sur des lieux de travail non uni- versitaires (comme le gouvernement fédéral et lâarmée), ainsi que sur des lieux de travail universitaires. Le chapitre définit plusieurs termes, qui seront utilisés tout au long de ce rapport, en sâassurant que les lecteurs ont une base similaire au fur et à mesure quâils parcourent ce document. Le chapitre explique égale- ment différentes méthodes de recherche pour examiner le harcèlement sexuel et discute des moyens de recueillir des informations précises sur un environne- ment. Le chapitre 3 se concentre sur lâenvironnement dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine universitaires. Il examine la fré- quence et la gravité du harcèlement sexuel pour les femmes dans ces domaines, en milieu universitaire, et identifie les caractéristiques de ce milieu et des sciences, de lâingénierie et la médecine universitaires, qui rendent le harcèle- ment sexuel plus probable.
32 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES Le chapitre 4 décrit les conséquences associées au harcèlement sexuel : comment il peut altérer la carrière des femmes, leur travail et leur santé men- tale et physique. Il examine la manière dont les femmes font face au harcèle- ment sexuel et pourquoi elles sont peu susceptibles de signaler officiellement ces expériences. Il examine également les conséquences que le harcèlement sexuel peut avoir dans les domaines de la science, lâingénierie et la médecine, en termes de progrès de la recherche dans ces domaines, dâintégrité de la re- cherche et de conséquences économiques. Le chapitre 5 passe en revue les mécanismes juridiques et politiques exis- tants qui réglementent le harcèlement sexuel et examine et décrit les raisons pour lesquelles ils nâont pas démontré leur efficacité pour réduire de manière significative le harcèlement sexuel. Le chapitre traite de la manière dont les lois en vigueur sont mises en Åuvre sur les campus et examine les conséquences des politiques et procédures des institutions académiques, notamment les pro- cessus de signalement. Il se termine par une réflexion sur le rôle des agences fédérales dans la prévention du harcèlement sexuel et dans lâapplication des politiques en la matière. Ãtant donné les limites des recours juridiques existants, le chapitre 6 traite des changements systémiques de la culture et du climat des institutions univer- sitaires qui peuvent commencer à réduire et à prévenir le harcèlement sexuel. Le chapitre décrit les raisons pour lesquelles les recherches suggèrent que cer- taines approches seront les plus efficaces, et décrit les pratiques et modèles pro- metteurs pour y parvenir. Le chapitre décrit lâimportance pour les dirigeants de soutenir et dâinitier ces changements et de mesurer et dâencourager les progrès, ainsi que le rôle important joué par les organisations professionnelles et autres organisations qui facilitent la recherche et la formation. Le rapport se termine par le chapitre 7, qui résume les résultats, conclusions et recommandations de notre commission.