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7 Résultats, conclusions et recommandations Prévenir et traiter efficacement le harcèlement sexuel des femmes dans les universités et les établissements supérieurs est un défi majeur, mais nous sommes optimistes quant à la capacité des institutions académiques à relever ce défi, si elles en manifestent la volonté. En effet, les recherches montrent les méthodes qui fonctionneront pour prévenir le harcèlement sexuel et expliquent pourquoi elles seront efficaces. Un changement systémique de la culture et du climat dans les universités, et les établissements supérieurs, peut empêcher que le harcèlement nâaffecte la prochaine génération de femmes qui entrent dans les sciences, lâingénierie et la médecine. Pour changer la culture et le climat actuels, il faut sâattaquer à toutes les formes de harcèlement sexuel, et pas seulement aux cas les plus visibles, aller au-delà du cadre juridique, soutenir les objectifs lorsquâils se présentent, amé- liorer la transparence et la responsabilité, diffuser la structure de pouvoir entre les professeur·e·s et les stagiaires, et réviser les systèmes et structures organi- sationnels pour valoriser la diversité, lâinclusion et le respect. Les dirigeant·e·s, à tous les niveaux du monde universitaire, seront nécessaires pour initier ces changements et pour établir et maintenir la culture et les normes. Toutefois, pour réussir à ancrer ces changements, tous les membres des campus universi- taires de notre pays â étudiant·e·s, enseignant·e·s, personnel et administrateurs ou administratrices â devront assumer la responsabilité de promouvoir un envi- ronnement civil et respectueux. Il est de la responsabilité de chacun·e de mettre fin au harcèlement sexuel.
270 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES Dans cette perspective optimiste, nous vous proposons la compilation sui- vante des résultats, conclusions et recommandations du rapport. RÃSULTATS ET CONCLUSIONS Chapitre 2 : Recherche sur le harcèlement sexuel 1. Le harcèlement sexuel est une forme de discrimination qui consiste en trois types de comportement de harcèlement : (1) le harcèlement sexiste (comportements verbaux et non-verbaux qui traduisent un senti- ment dâhostilité, visent à objectifier, exclure ou rabaisser les membres dâun sexe), (2) les attentions sexuelles non-désirées (avances sexuelles ver- bales ou physiques non désirées, qui peuvent aller jusquâà lâagression) et (3) la coercition sexuelle (lorsque des faveurs accordées sur le plan pro- fessionnel ou scolaire sont conditionnées par lâactivité sexuelle). Les dis- tinctions entre les types de harcèlement sont importantes, notamment parce que de nombreuses personnes ne réalisent pas que le harcèlement sexiste est une forme de harcèlement sexuel. 2. Le comportement de harcèlement sexuel peut être soit direct (visant un individu en particulier), soit ambiant (il sâagit dâun niveau général de harcèlement sexuel dans un environnement donné) et est préjudiciable dans les deux cas. Il est considéré comme illégal lorsquâil crée un envi- ronnement hostile (harcèlement sexuel ou attentions sexuelles non désirées suffisamment « graves ou envahissantes » pour modifier les conditions de travail, altérer les performances professionnelles ou entraver la capacité dâune personne à accéder à des études), ou lorsquâil constitue une contre- partie (lorsque des faveurs accordées sur le plan professionnel ou scolaire sont conditionnées par lâactivité sexuelle). 3. Il existe des méthodes scientifiques fiables pour déterminer la préva- lence du harcèlement sexuel. Pour mesurer lâincidence du harcèlement sexuel, les enquêtes doivent suivre les meilleures pratiques qui ont émer- gées de la science du harcèlement sexuel. Cela inclut lâutilisation de la base de données du questionnaire sur les expériences sexuelles, lâinstru- ment le plus largement utilisé et le plus validé disponible pour mesurer le
7. Résultats, conclusions et recommandations 271 harcèlement sexuel, lâévaluation de comportements spécifiques sans que la personne interrogée nâait à les qualifier de « harcèlement sexuel », lâaccent mis sur lâexpérience à chaud ou lâobservation du comportement (plutôt que sur la rumeur ou les ouï-dire) et lâaccent mis sur les événements récents (1 à 2 ans, pour éviter les problèmes de détérioration de la mémoire). Se baser sur le nombre de rapports officiels de harcèlements sexuel faits par une organisation nâest pas une méthode précise pour déterminer la prévalence. 4. Certaines enquêtes sous-estiment lâincidence du harcèlement sexuel parce quâelles nâont pas suivi les pratiques standard et valides pour la recherche sur les enquêtes et le harcèlement sexuel. 5. Si des enquêtes correctement menées sont les meilleures méthodes pour estimer la prévalence du harcèlement sexuel, dâautres aspects impor- tants du harcèlement sexuel et de ses conséquences peuvent être exa- minés en utilisant dâautres méthodes de recherche, telles que des expé- riences comportementales en laboratoire, des entretiens, des études de cas, des ethnographies et des recherches juridiques. Ces études peuvent fournir des informations sur la présence et la nature du comportement sexuel dans une organisation, sur la manière dont il se développe et se poursuit (et in- fluence le climat de lâorganisation), et sur la façon dont il atténue ou ampli- fie les résultats du harcèlement sexuel ; 6. Le harcèlement sexuel reste un problème persistant sur le lieu de tra- vail en général. Sur les lieux de travail, cinq caractéristiques communes se dégagent : a. les femmes sont plus souvent victimes de harcèlement sexuel que les hommes ; b. le harcèlement sexiste (par exemple, les comportements qui véhi- culent lâidée que les femmes nâont pas leur place ou ne méritent pas le respect) est, de loin, la forme de harcèlement sexuel la plus répandue. Lorsquâun environnement est envahi par le harcèlement sexiste, les attentions sexuelles non désirées et la coercition sexuelle deviennent plus probables â en partie parce que les attentions sexuelles non-désirées et la coercition sexuelle ne sont presque jamais vécues par les femmes sans quâelle ne soient simultanément victimes de harcèle- ment sexuel.
272 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES c. les hommes sont plus susceptibles que les femmes de commettre des actes de harcèlement sexuel ; d. les collègues et les pairs commettent plus souvent du harcèlement sexuel que les supérieur·e·s ; e. les comportements de harcèlement sexuel ne sont généralement pas des incidents isolés ; il sâagit plutôt dâune série ou dâun schéma dâinci- dents et de comportements qui sâaggravent parfois ; 7. Les recherches qui nâincluent pas lâétude des femmes de couleur et des femmes appartenant à des minorités sexuelles et de genre présentent un tableau incomplet des expériences des femmes en matière de har- cèlement sexuel. Les recherches préliminaires sur les expériences des femmes de couleur et des femmes appartenant à des minorités sexuelles et de genre révèlent que leurs expériences de harcèlement sexuel peuvent être différentes de celles de la population plus large des femmes cisgenres, hétérosexuelles et blanches. a. les femmes de couleur subissent davantage de harcèlement (sexuel, racial/ ethnique, ou les deux) que les femmes blanches, les hommes blancs et les hommes de couleur. Les femmes de couleur sont souvent victimes de harcèlement sexuel, y compris de harcèlement racial ; b. les personnes appartenant à des minorités sexuelles et de genre su- bissent plus de harcèlement sexuel que les femmes hétérosexuelles ; 8. Les deux caractéristiques des environnements les plus associés à des taux plus élevés de harcèlement sexuel sont (a) les rapports hommes- femmes et le leadership à prédominance masculine, (b) et un climat organisationnel qui montre quâil tolère le harcèlement sexuel (par exemple, des dirigeant·e·s qui ne prennent pas les plaintes au sérieux, ne sanctionnent pas les auteurs ou ne protègent pas les plaignant·e·s contre les représailles) ; 9. Le climat organisationnel est, de loin, le plus grand facteur de prédilec- tion pouvant empêcher les gens de harceler sexuellement dâautres per- sonnes. Une personne plus susceptible de se livrer à des comportements de harcèlement est nettement moins susceptible de le faire dans un environ- nement qui ne soutient pas les comportements de harcèlement et/ ou des conséquences fortes, claires, transparentes pour ces comportements.
7. Résultats, conclusions et recommandations 273 Chapitre 3 : Le harcèlement sexuel dans les sciences, lâingénierie et la médecine universitaires 1. Les sciences, lâingénierie et la médecine universitaires présentent au moins quatre caractéristiques qui créent des niveaux de risque plus élevés de harcèlement sexuel : a. un environnement dominé par les hommes, avec des hommes en po- sition de pouvoir et dâautorité ; b. une tolérance organisationnelle à lâégard des comportements de harcèlement sexuel (par exemple, ne pas prendre les plaintes au sé- rieux, ne pas sanctionner les auteurs ou ne pas protéger les plaignant·e·s contre les représailles) ; c. des relations hiérarchiques et de dépendance entre les profes- seur·e·s et leurs stagiaires (par exemple, les étudiant·e·s, les stagiaires postdoctoraux, les docteur·e·s) ; d. les environnements isolés (par exemple, les laboratoires, les sites de recherche sur le terrain et les hôpitaux) dans lesquels le corps ensei- gnant et les stagiaires passent beaucoup de temps ; 2. Le harcèlement sexuel est courant dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine. Chaque type de harcèlement sexuel se produit, dans les domaines de la science, de lâingénierie et de la méde- cine universitaires, à un rythme similaire à celui des autres lieux de travail. a. Plus de 50% des femmes membres du corps enseignant et du personnel et 20 à 50% des étudiantes sont victimes de harcèlement sexuel dans le milieu universitaire. b. Les étudiantes en médecine universitaire sont plus souvent harcelées sexuellement par le corps professoral/le personnel que les étudiantes en sciences et en ingénierie. c. Les étudiantes/ stagiaires sont confrontées au harcèlement sexuel, ou en sont victimes, à cause du corps enseignant/ du personnel et dâautres étudiant·e·s/ stagiaires ; d. Les femmes membres du corps professoral sont harcelées sexuellement par dâautres membres du corps professoral ou du personnel, ainsi que
274 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES des étudiant·e·s ou des stagiaires. e. Les étudiantes, les stagiaires et les membres du corps enseignant des centres médicaux universitaires sont harcelées sexuellement par des patient·e·s et leurs familles, en plus du harcèlement quâelles subissent à cause de leurs collègues et des personnes occupant des postes de di- rection. Chapitre 4 : Conséquences du harcèlement sexuel sur la carrière et la santé des femmes et façons dont elles réagissent face au harcèlement sexuel 1. Le harcèlement sexuel porte atteinte à la carrière et aux études des femmes, ainsi quâà leur santé mentale et physique. Les résultats négatifs sont visibles dans tous les secteurs dâactivité, toutes les professions, toutes les races, toutes les ethnies et toutes les classes sociales, et même lorsque les femmes ne qualifient pas leurs expériences de « harcèlement sexuel ». a. Lorsque les femmes sont victimes de harcèlement sexuel sur le lieu de travail, les résultats professionnels comprennent une baisse de la satis- faction au travail, le retrait de leur organisation (câest-à -dire le fait de sâéloigner physiquement ou mentalement du travail sans avoir réelle- ment démissionné, dâavoir des pensées ou des intentions de quitter leur emploi et de quitter réellement leur emploi), une baisse de lâengage- ment organisationnel (câest-à -dire le fait de se sentir désillusionnée ou en colère contre lâorganisation), une augmentation du stress au travail et une baisse de la productivité ou des performances. b. Lorsque des étudiantes sont victimes de harcèlement sexuel, les résul- tats scolaires comprennent une démotivation, une hausse de lâabsen- téisme, lâabandon des cours, une moindre attention en classe, des notes inférieures, un changement de conseiller, un changement de filière, un transfert vers un autre établissement dâenseignement ou lâabandon des études. 2. e harcèlement sexiste a des effets négatifs. Le harcèlement de genre L grave, ou fréquent, sur une période donnée peut entraîner le même niveau de conséquences professionnelles et psychologiques négatives que des cas isolés de coercition sexuelle. Le harcèlement sexiste, souvent considéré
7. Résultats, conclusions et recommandations 275 comme une forme « mineure » et plus conséquente de harcèlement sexuel, ne peut être omis lorsquâil est présent dans une organisation. 3. Plus la fréquence, lâintensité et la durée des comportements de harcèle- ment sexuel sont importantes, plus les femmes font état de symptômes de dépression, de stress et dâanxiété, et dâeffets généralement négatifs sur leur bien-être psychologique. 4. Plus les femmes sont harcelées sexuellement dans un environnement, plus elles pensent à partir et finissent par partir à cause du harcèle- ment sexuel. 5. lus lâauteur dâun crime a de pouvoir sur la victime, plus les impacts et P les conséquences négatives subies par cette dernière sont importants. 6. our les femmes de couleur, les recherches préliminaires montrent que P lorsque le harcèlement sexuel se produit simultanément avec dâautres types de harcèlement (câest-à -dire le harcèlement racial), les expé- riences peuvent avoir des conséquences plus graves pour elles. 7. Le harcèlement sexuel a des effets négatifs qui touchent non seule- ment les cibles du harcèlement mais aussi les témoins, les collègues, les groupes de travail et les organisations toutes entières. 8. es femmes font face au harcèlement sexuel de diverses manières, le L plus souvent en ignorant, ou en apaisant, la personne harcelante, et en cherchant un soutien social. 9. La réponse la moins courante pour les femmes consiste à signaler offi- ciellement lâexpérience de harcèlement sexuel. Pour beaucoup, cela est dû à la perception exacte quâelles peuvent subir des représailles ou dâautres conséquences négatives liées à leur vie personnelle et professionnelle. 10. Quatre aspects du travail universitaire en sciences, ingénierie et méde- cine, ont tendance à faire taire les victimes et à limiter les opportunités de carrière, tant pour les victimes que pour les témoins : a. a dépendance à lâégard des conseiller·e·s et des mentor·e·s pour l lâavancement de la carrière ; b. e système de méritocratie qui ne tient pas compte des baisses de pro- l ductivité et de moral dues au harcèlement sexuel ;
276 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES c. la culture « machiste » qui règne dans certains domaines ; d. e réseau de communication informel, dans lequel les rumeurs et les l accusations sont répandues au sein, et entre, les programmes et do- maines spécialisés. 11. Lâeffet cumulatif du harcèlement sexuel est un préjudice important à lâin- tégrité de la recherche et une perte coûteuse de talents dans les domaines de la science, de lâingénierie et de la médecine. Les femmes professeures de sciences, dâingénierie et de médecine, qui sont victimes de harcèlement sexuel, signalent trois sorties professionnelles courantes : se retirer des postes de direction pour éviter lâagresseur, quitter leur institution et aban- donner complètement leur domaine. Chapitre 5 : Mécanismes juridiques et politiques permettant de lutter contre le harcèlement sexuel 1. Le système juridique nâest pas un mécanisme adéquat permettant de réduire ou prévenir le harcèlement sexuel. Le respect des obligations légales est indispensable mais pas suffisant pour susciter le changement nécessaire pour lutter contre le harcèlement sexuel. a. Une approche trop légaliste du problème du harcèlement sexuel risque dâentraîner une mauvaise appréciation de la véritable nature et de lâétendue du problème. La législation et lâélaboration des politiques en matière de harcèlement sexuel se sont concentrées étroitement sur les formes sexualisées et coercitives de harcèlement sexuel, et non sur le type de harcèlement sexuel que la recherche a identifié comme étant beaucoup plus répandu et parfois tout aussi néfaste. b. Une grande partie du harcèlement sexuel dont sont victimes les femmes et qui affecte leurs carrières dans les sciences, lâingénierie et la méde- cine ne répond pas aux critères légaux de discrimination illégale en vertu de la loi actuelle. 2. Lâinterprétation judiciaire des Titres IX et VII a incité les organisa- tions à créer des politiques, des procédures et des formations sur le harcèlement sexuel qui mettent lâaccent sur le respect symbolique de la législation en vigueur et sur la prévention de la responsabilité, et non sur la prévention du harcèlement sexuel.
7. Résultats, conclusions et recommandations 277 a. Les entités privées, telles que les entreprises et les universités privées, sont autorisées à garder leurs politiques et procédures internes â et leurs recherches sur ces politiques et procédures â confidentielles, ce qui li- mite les recherches qui peuvent être faites sur les politiques efficaces en matière de prévention et de traitement du harcèlement sexuel. b. Diverses politiques juridiques, et lâinterprétation de ces politiques, permettent aux institutions universitaires de maintenir le secret et/ ou la confidentialité concernant les résultats des enquêtes sur le harcè- lement sexuel, lâarbitrage et les accords du règlement. Des collègues peuvent également hésiter à se mettre en garde les un·e·s les autres contre les problèmes de harcèlement sexuel dans un contexte de récente embauche ou promotion par crainte de répercussions juridiques (câest- à -dire dâêtre poursuivi·e·s pour diffamation et/ ou discrimination). Ce manque de transparence dans le processus dâadjudication au sein des organisations peut dissimuler le harcèlement sexuel perpétrés par des auteur·e·s de harcèlement sexuel récidivistes ou en série. Cela crée des obstacles supplémentaires pour les chercheur·e·s et autres personnes qui étudient les plaintes pour harcèlement et leurs résultats, et constitue, également, un obstacle à la détermination de lâefficacité des politiques de ces procédures. 3. Les Titres IX et VII et la jurisprudence reflètent lâhypothèse inexacte selon laquelle une victime de harcèlement sexuel signalera rapidement le harcèlement sans craindre de représailles. Pour traiter efficacement le harcèlement sexuel par la loi, les politiques, ou procédures institution- nelles, ou un changement culturel, il faut tenir compte du fait que les cibles du harcèlement sexuel sont peu susceptibles de signaler le harcèlement et sont souvent confrontées à des représailles pour lâavoir signalé (bien que cela soit illégal). 4. La crainte dâune responsabilité légale peut empêcher les institutions dâêtre disposées à évaluer efficacement la formation pour mesurer son impact sur la réduction du harcèlement. Les employé·e·s sont géné- ralement éduqué·e·s au moyen de formations sur le harcèlement sexuel, agissant comme un élément central pour démontrer aux tribunaux que les institutions ont « fait preuve dâune grande attention pour prévenir et cor- riger rapidement tout comportement de harcèlement sexuel ». Toutefois,
278 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES les recherches nâont pas démontré que ces formations permettaient de pré- venir le harcèlement sexuel. Ainsi, si les institutions évaluaient leurs pro- grammes de formation, elles les trouveraient probablement inefficaces, ce qui, à son tour, pourrait susciter des craintes au sein des institutions quant à leur risque de responsabilité, car elles nâexerceraient alors pas sciemment une diligence raisonnable. 5. Pour tenir les individus et les institutions responsables du harcèle- ment sexuel et démontrer que le harcèlement sexuel est un problème grave, les organismes de financement fédéraux américains doivent être conscients du fait que les chercheur·e·s princip·aux·alles, les co- chercheur·e·s princip·aux·alles et le personnel des subventions ont des politiques de harcèlement sexuel exagérées. On ne peut affirmer si et comment les agences fédérales prendront des mesures allant au-delà des exigences des Titres IX et VII pour garantir que les subventions fédérales, composées de lâargent des contribuables, ne soutiennent pas la recherche, les institutions universitaires ou les programmes dans lesquels le harcèle- ment sexuel sévit. Les agences scientifiques fédérales indiquent généra- lement (par exemple dans les appels à propositions ou autres annonces) quâelles ont une politique de « tolérance zéro » en matière de harcèlement sexuel. En général, les agences fédérales comptent sur les institutions bé- néficiaires pour enquêter sur les violations du Titre IX et en assurer le suivi. En nâévaluant pas et en nâabordant pas le rôle des institutions et des orga- nisations professionnelles dans lâhabilitation des harceleurs sexuels indi- viduels, les agences fédérales ne risquent pas de résoudre le problème du harcèlement sexuel. 6. Pour lutter contre les effets du harcèlement sexuel sur lâintégrité de la recherche, certaines parties du gouvernement fédéral et plusieurs organisations professionnelles commencent à se concentrer plus large- ment sur les politiques relatives à lâintégrité de la recherche et sur les codes dâéthique plutôt que sur la définition de lâinconduite en matière de recherche. On risque de passer à côté de puissantes incitations au chan- gement si le harcèlement sexuel nâest pas considéré comme aussi important que lâinconduite en matière de recherche, en termes dâeffet sur lâintégrité de la recherche.
7. Résultats, conclusions et recommandations 279 Chapitre 6 : Changer la culture et le climat dans lâenseignement supérieur 1. Un changement systémique de la culture et du climat dans lâensei- gnement supérieur est nécessaire pour prévenir et lutter efficacement contre les trois formes de harcèlement sexuel. En dépit de lâattention croissante portée à cette question au cours de ces dernières années, aucun élément ne permet de penser que les politiques, procédures et approches actuelles ont permis de réduire de manière significative le harcèlement sexuel. Il est temps dâenvisager des approches qui tiennent compte des sys- tèmes, des cultures et des climats qui permettent au harcèlement sexuel de se perpétuer. 2. Il est nécessaire que les organes de direction soient solides et efficaces, à tous les niveaux de lâorganisation, pour modifier le climat et la culture de lâenseignement supérieur à lâéchelle du système. La direction de lâor- ganisation â à tous les niveaux â joue un rôle important dans lâétablissement et le maintien de la culture et des normes de lâorganisation. Cependant, les dirigeant·e·s des établissements dâenseignement supérieur disposent rare- ment dâune formation au leadership leur permettant dâaborder de manière réfléchie les questions relatives à la culture et au climat, et la formation au leadership existante est souvent de piètre qualité. 3. Les environnements dotés de systèmes et de structures organisation- nelles qui valorisent et soutiennent la diversité, lâinclusion et le respect sont des environnements où les comportements de harcèlement sexuel sont moins susceptibles de se produire. Le harcèlement sexuel se pro- duit souvent sur fond dâincivilité, câest-à -dire dans un environnement où le manque de respect est généralisé. Une culture qui valorise le respect et la civilité est un environnement qui peut soutenir des politiques et des procédures visant à prévenir et à sanctionner le harcèlement sexuel, tandis quâune culture impassible anéantira les efforts déployés pour lutter contre le harcèlement sexuel. a. Il existe des stratégies dâintervention efficaces, fondées sur des données empiriques, permettant dâintégrer la diversité des sexes dans les pra- tiques dâembauche. b. Axer les structures dâévaluation et de récompense sur la coopération et
280 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES la collégialité, plutôt que sur les seules mesures de la performance de lâenseignement et de la recherche au niveau individuel, pourrait avoir un impact significatif sur lâamélioration de lâenvironnement dans le monde universitaire. c. Il existe des stratégies dâintervention efficaces, fondées sur des données probantes, pour améliorer la civilité et le respect interpersonnels dans les groupes de travail et les équipes. d. Une organisation qui sâengage à améliorer le climat organisationnel doit sâattaquer aux problèmes de partialité dans le milieu universitaire. Une formation visant à réduire les préjugés personnels peut entraîner des changements à plus grande échelle dans les comportements adoptés dans les départements universitaires. e. Une formation fondée sur les compétences, orientée sur lâintervention des témoins favorise une culture de soutien, et non de silence. En dé- nonçant les comportements négatifs sur place, tous les membres dâune communauté universitaire contribuent à créer une culture dans laquelle les comportements abusifs sont considérés comme une aberration et non comme la norme. 4. La réduction des structures de pouvoir hiérarchique et la diffusion plus large du pouvoir parmi les professeur·e·s et les stagiaires peuvent réduire le risque de harcèlement sexuel. Les départements et les institu- tions pourraient adopter les approches suivantes pour diffuser le pouvoir : a. Utiliser des styles de leadership égalitaires qui reconnaissent que les personnes â à tous les niveaux dâexpérience et dâexpertise â disposent de grandes connaissances à apporter. b. Adopter des réseaux de mentorat ou des comités de conseil qui per- mettent une diversité de voies potentielles pour les conseils, le finance- ment, le soutien et le signalement informel du harcèlement. c. Développer des moyens permettant dâaccorder des financements pour la recherche aux stagiaires plutôt quâau seul ou la seule chercheur·e principal·e. d. Assumer la responsabilité de préserver le travail potentiel de lâéquipe de recherche et des stagiaires en redistribuant le financement si un·e
7. Résultats, conclusions et recommandations 281 chercheur·e principal·e ne peut pas poursuivre le travail parce quâil·elle a instauré un climat qui favorise le harcèlement sexuel et en garantis- sant le financement des stagiaires si lâinstitution ou le bailleur de fonds retire le financement au chercheur principal en raison du harcèlement sexuel. 5. Les systèmes et les politiques qui soutiennent les cibles du harcèlement sexuel et les options pro-vidéo pour le signalement informel et formel peuvent réduire la réticence à signaler le harcèlement ainsi que le pré- judice que le harcèlement sexuel peut causer à la cible. a. Lâorientation des étudiant·e·s, des stagiaires, du corps enseignant et du personnel, à tous les niveaux, vers la culture de lâinstitution académique et ses politiques et procédures de traitement du harcèlement sexuel, peut être un élément important pour établir un climat qui démontre que le harcèlement sexuel nâest pas toléré et que les cibles seront soutenues. b. Les institutions pourraient mettre en place des systèmes de réponse qui renforcent les objectifs en fournissant des moyens alternatifs et moins formels dâaccéder aux services de soutien, les vices, lâenregistrement des informations et le signalement des incidents sans crainte de repré- sailles. c. Soutenir les étudiant·e·s victimes, câest aussi les aider à gérer leur édu- cation et leur formation sur le long terme. 6. Les accords de confidentialité et de non-divulgation isolent les vic- times de harcèlement sexuel en limitant leur capacité à parler de leurs expériences avec dâautres personnes et peuvent servir à protéger les auteur·e·s de harcèlement qui ont harcelé des personnes à plusieurs reprises. 7. La transparence et la responsabilité sont des éléments cruciaux des politiques efficaces en matière de harcèlement sexuel. Les systèmes qui établissent clairement les comportements inacceptables, et tiennent les membres de la communauté pour responsables du respect des attentes com- portementales et culturelles établies par les dirigeant·e·s, ont des taux de harcèlement sexuel plus faibles. a. Les éléments clés des politiques claires de lutte contre le harcèlement sont quâelles sont rapidement et facilement assimilées (câest-à -dire
282 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES quâelles utilisent des brochures dâune page ou des infographies et ne sont pas rédigées dans un langage juridiquement dense) et quâelles in- diquent clairement que les personnes seront tenues pour responsables en cas de violation de la politique. b. Une série de conséquences disciplinaires progressives (telles que des conseils, des changements de responsabilités professionnelles, des ré- ductions de salaire et une suspension ou un licenciement), proportion- nelles à la gravité et à la fréquence des faits, a le potentiel de corriger le comportement avant quâil ne sâaggrave, et ce, sans perturber de manière significative un programme universitaire. c. Dans le cadre dâefforts menés pour changer les comportements et amé- liorer le climat, il peut également être approprié pour les institutions dâentreprendre certaines mesures axées sur la réhabilitation, même si celles-ci ne sont pas des sanctions en soi. d. Pour que les personnes dans une institution comprennent que celle-ci ne tolère pas le harcèlement sexuel, elle doit montrer quâelle enquête et engage la responsabilité des auteur·e·s dans un délai raisonnable. Les institutions peuvent rendre anonymes les informations de base et four- nir des rapports réguliers qui indiquent le nombre de rapports faisant lâobjet dâune enquête et les résultats de celle-ci. e. Une approche permettant dâaméliorer la transparence et de démontrer que lâinstitution prend le harcèlement sexuel au sérieux consiste à en- courager la révision interne de ses politiques, procédures et interven- tions en matière de harcèlement sexuel, et à avoir des dialogues avec les membres de la communauté de leur campus (en particulier les cher- cheurs experts sur ces sujets) sur les moyens dâaméliorer la culture et le climat et de changer les comportements. 8. Si la formation sur le harcèlement sexuel peut être utile pour améliorer la connaissance des politiques et des comportements qui constituent un harcèlement sexuel, il nâa pas été démontré quâelle permet de pré- venir le harcèlement sexuel ou de modifier les comportements ou les croyances des personnes, et certaines formations montrent un effet né- gatif (ou impact). Les efforts menés en ce qui concerne la formation sur
7. Résultats, conclusions et recommandations 283 le harcèlement sexuel doivent être évalués, et étudiés, pour déterminer leur efficacité et indiquer les points à modifier ou à améliorer, notamment les types de formation qui présentent des effets négatifs. 9. Dans la mesure où la littérature sur la formation fournit des lignes directrices générales permettant de créer des formations ayant un im- pact, qui peuvent changer le climat et le comportement, celles-ci com- prennent les éléments suivants : a. Formation destinée à des populations spécifiques. Dans le milieu universitaire, ces populations comprendraient les étudiant·e·s, les boursier·e·s postdoctoraux, le personnel, les professeur·e·s et les diri- geant·e·s. b. Veiller à la motivation institutionnelle de la formation, qui peut avoir un impact sur lâefficacité de la formation ; par exemple, les approches de conformité ont un impact positif limité. c. Mener la formation en faisant appel à des formateurs qualifiés et offrir aux stagiaires des exemples spécifiques de conduite inappro- priée. Nous constatons quâune grande partie de la formation sur le har- cèlement sexuel est aujourdâhui proposée par le biais dâun mini-cours en ligne ou du visionnage dâune courte vidéo. d. Décrire les normes de comportement de manière claire et accessible (par exemple, en évitant les termes juridiques et techniques). e. Ãtablir des normes de comportement plutôt que de chercher uni- quement à influencer les attitudes et les croyances. Il est essentiel de communiquer clairement les attentes en matière de comportement et dâenseigner les compétences comportementales. f. Mener la formation dans le respect des meilleures pratiques, notam- ment en évaluant, de manière appropriée, les besoins de préformation et lâévaluation de son efficacité. 10. Pour créer un climat de prévention du harcèlement sexuel, il faut me- surer le climat en ce qui concerne le harcèlement sexuel, la diversité et le respect, et évaluer les progrès réalisés dans la réduction du harcèle- ment sexuel.
284 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES 11. Les efforts visant à encourager des changements à lâéchelle du système, tels quâAthena SWAN1 sont essentiels pour inciter les organisations et les départements au sein des organisations à opérer les changements nécessaires. 12. Le harcèlement sexuel dans les domaines des sciences, de lâingénierie et de la médecine sera plus efficacement traité dans lâenseignement supé- rieur si les normes comportementales sont également respectées dans les environnements hors campus, tels que les réunions dâorganisations professionnelles et les sites de recherche et de terrain en collaboration. 13. Les organisations professionnelles peuvent être de puissants moteurs de changement grâce à leur capacité à contribuer à lâéducation, à la formation, à la codification et au renforcement des attentes culturelles de leurs communautés respectives de scientifiques, dâingénieurs et de médecins. Certaines organisations professionnelles ont pris des mesures pour prévenir le harcèlement sexuel parmi leurs membres, et y répondre. Bien que chaque société professionnelle ait adopté une approche légère- ment différente pour lutter contre le harcèlement sexuel, il existe certaines approches communes, telles que : a. Adopter de nouveaux codes de conduite et de nouvelles règles concer- nant spécifiquement la participation à des conférences. b. Inclure le harcèlement sexuel dans les codes dâéthique et enquêter sur les rapports de harcèlement sexuel (il sâagit dâune nouvelle responsa- bilité pour les organisations professionnelles, et celles-ci examinent comment prendre en compte la loi, les établissements dâorigine, les procédures régulières et les rapports minutieux lors du traitement des rapports de harcèlement sexuel). c. Exiger des membres quâils reconnaissent, par écrit, les règles et co- des de conduite de la société professionnelle en matière de harcèlement sexuel lors de lâinscription à la conférence, et lors de lâadhésion et de son renouvellement. 1âAthena SWAN (Scientific Womenâs Academic Network). Voir https://www.ecu.ac.uk/ equality-charters/athena-swan/.
7. Résultats, conclusions et recommandations 285 d. Soutenir et concevoir des programmes qui préviennent le harcèlement et apportent des compétences pour intervenir lorsquâune personne en est victime. e. Renforcer les déclarations sur le harcèlement sexuel, lâintimidation et la discrimination dans les codes de conduite des organisations profession- nelles, que certaines dâentre elles définissent comme une inconduite en matière de recherche. f. Prendre en compte des fautes professionnelles liées au harcèlement dans les décisions dâattribution de prix scientifiques. 14. Il existe de nombreuses approches prometteuses pour changer la culture et le climat dans le milieu universitaire. Toutefois, des recherches com- plémentaires évaluant les effets et les valeurs des approches suivantes sont nécessaires pour identifier les meilleures pratiques : a. Les politiques, les procédures, les formations et les interventions, en particulier la manière dont elles préviennent, et font cesser, les compor- tements de harcèlement sexuel, modifient la perception ou la tolérance des organisations à lâégard des comportements de harcèlement sexuel et réduisent les conséquences négatives liées aux signalements des in- cidents. Cela comprend des mécanismes de signalement informels et formels, la formation des témoins à lâintervention, la formation de la direction de lâétablissement, la formation au harcèlement sexuel, des interventions visant à améliorer la civilité, des réglementations en ma- tière de signalement obligatoire et des approches visant à soutenir et à améliorer la communication avec la victime. b. Les mécanismes dâoptions de résolution orientés vers la victime et les mécanismes par lesquels cette dernière a un rôle à jouer dans la décision de ce qui arrive à lâauteur, y compris les pratiques de justice restaura- tive. c. Les mécanismes de protection des victimes contre les représailles. d. Les mesures axées sur la réhabilitation afin de discipliner les auteurs. e. Les systèmes dâincitation pour encourager les responsables de lâensei- gnement supérieur à sâattaquer au problème du harcèlement sexuel sur les campus.
286 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES RECOMMANDATIONS RECOMMANDATION 1 : Instaurer des environnements diversifiés, in- clusifs et respectueux o. Les établissements universitaires et leurs dirigeants doivent prendre des mesures explicites pour parvenir à une plus grande équité entre les sexes et les races en matière de recrutement et de promotion, et amé- liorer, ainsi, la représentation des femmes à tous les niveaux. p. Les établissements universitaires et leurs dirigeants doivent prendre des mesures pour favoriser la coopération, le respect au travail et le professionnalisme, au niveau du corps enseignant, du personnel et des étudiants/stagiaires, et devraient évaluer le corps enseignant et le per- sonnel sur la base de ces critères lors du recrutement et des promotions. q. Les établissements universitaires doivent combiner les efforts de lutte contre le harcèlement avec des programmes promouvant la civilité. r. Les établissements universitaires doivent adapter leur formation à des populations spécifiques (dans le milieu universitaire, il sâagit des étudiant·e·s/ stagiaires, du personnel, du corps enseignant et des diri- geant·e·s) et suivre les meilleures pratiques lorsquâils conçoivent des programmes de formation. Les formations devraient être considérées comme un moyen de fournir les compétences nécessaires à tous les membres de la communauté universitaire, chacun dâentre eux ayant un rôle à jouer dans la création dâun climat organisationnel positif, axé sur la sécurité et le respect, et non pas simplement comme une méthode permettant dâassurer le respect des lois. s. Les établissements universitaires doivent utiliser les approches abor- dées au cours des formations qui permettent aux participants de déve- lopper les compétences nécessaires pour savoir comment intervenir en cas de comportement inapproprié, voire comment lâinterrompre. Ces programmes de formation devraient être évalués pour déterminer sâils sont efficaces et quels aspects de la formation sont les plus importants pour changer la culture. t. Les programmes de formation contre le harcèlement sexuel doivent se
7. Résultats, conclusions et recommandations 287 concentrer sur le changement de comportement, et non sur la modifi- cation des croyances. Les programmes doivent sâattacher à communi- quer clairement les attentes en matière de comportement, à préciser les conséquences en cas dâéchec et à identifier les mécanismes à mobiliser lorsque ces attentes ne sont pas satisfaites. Les programmes de forma- tion ne doivent pas sâattacher à éviter la responsabilité juridique. RECOMMANDATION 2 : Lutter contre la forme la plus répandue de harcèlement sexuel : le harcèlement sexiste Les responsables des établissements universitaires, et des sites de recherche et de formation, doivent davantage prêter attention à la problématique du har- cèlement sexiste et adopter des politiques à ce sujet afin de sâattaquer à la forme la plus répandue de harcèlement sexuel et prévenir dâautres formes de harcèle- ment sexuel. RECOMMANDATION 3 : Dépasser le cadre légal pour se confronter à la culture et au climat Les institutions universitaires, les sites de recherche et de formation et les agences fédérales, doivent aller au-delà des interventions, ou des politiques, qui se conforment au cadre légal et qui reposent uniquement sur des rapports formels établis par les victimes. Le harcèlement sexuel doit être traité comme un problème culturel et de climat ambiant important qui exige des dirigeants institutionnels quâils sâengagent auprès des étudiants, et des autres membres de la communauté du campus, et quâils les écoutent. RECOMMANDATION 4 : Améliorer la transparence et la responsabilité a. Les établissements dâenseignement supérieur doivent élaborer â et partager facilement â des politiques claires, accessibles et cohérentes en matière de harcèlement sexuel et de normes comportementales. Ces politiques doivent comporter une série de sanctions disciplinaires clai- rement énoncées, appropriées et progressives, pour les individus qui violent les réglementations et/ ou les lois sur le harcèlement sexuel. Les mesures disciplinaires prises doivent être proportionnelles à la gravité et à la fréquence des faits perpétrés. Les mesures disciplinaires ne doivent pas être perçues comme un avantage pour le corps profes-
288 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES soral, comme, par exemple, une réduction de la charge dâenseigne- ment ou du temps passé en-dehors des responsabilités de service sur le campus. Les décisions concernant les mesures disciplinaires, si elles sont indiquées ou requises, doivent être prises de manière équitable et en temps utile, à lâissue dâun processus dâenquête équitable pour toutes les parties2. b. Les institutions universitaires doivent être aussi transparentes que pos- sible sur la manière dont elles traitent les plaintes pour harcèlement sexuel. Il faut, pour cela, trouver un équilibre entre les questions de confidentialité et les questions de transparence. Les rapports annuels, qui fournissent des informations sur (1) le nombre et le type de cas signalés (de manière formelle et informelle), (2) le nombre de rapports qui font actuellement lâobjet dâune enquête et (3) le nombre dâaffaires qui ont été jugées, ainsi que des descriptions générales des mesures disciplinaires prises, qui doivent être communiqués à lâensemble de la communauté universitaire : étudiants, stagiaires, enseignants, admi- nistrateurs, personnel, anciens étudiants et bailleurs de fonds. A mini- ma, les résultats de lâenquête et toute mesure disciplinaire doivent être communiqués à la ou aux victime(s) et/ ou à la ou aux personne(s) qui ont signalé les faits. c. Les institutions universitaires doivent se sentir responsables du climat qui règne au sein de leur structure. à ce titre, elles devraient utiliser des enquêtes sur le climat pour examiner plus en détail et traiter le harcèlement sexuel systémique, notamment lorsque les enquêtes in- diquent que des écoles ou des établissements spécifiques ont des taux élevés de harcèlement ou ne parviennent pas à réduire durablement le niveau de harcèlement sexuel. d. Les établissements dâenseignement supérieur doivent considérer le harcèlement sexuel comme une inconduite en matière de recherche, en raison de son effet sur lâintégrité de la recherche. Ils doivent ren- forcer la collaboration entre les bureaux qui supervisent lâintégrité de Des détails supplémentaires sur les processus et les conseils sur la manière dâenquêter, et de 2ââ statuer de manière équitable et appropriée, sur ces questions ne sont pas communiqués, car il sâagit de questions complexes qui dépassaient le cadre de cette étude.
7. Résultats, conclusions et recommandations 289 la recherche (câest-à -dire ceux qui sâoccupent des questions relatives à lâéthique, lâinconduite, la diversité et le harcèlement) ; centraliser les ressources, informations et expertises, fournir davantage de ressources pour traiter les plaintes et travailler avec les victimes, et appliquer des sanctions aux chercheur·e·s reconnu·e·s coupables de harcèlement sexuel. RECOMMANDATION 5 : Distribuer les relations hiérarchiques et dépendantes entre les stagiaires et les professeurs Les établissements universitaires doivent envisager des mécanismes de dis- tribution du pouvoir (câest-à -dire des réseaux de mentorat ou des comités de conseil et un financement ministériel, plutôt quâun financement provenant uni- quement dâun·e chercheur·e· principal·e) pour réduire le risque de harcèlement sexuel. RECOMMANDATION 6 : Apporter du soutien aux victimes Les institutions universitaires doivent faire comprendre que le fait de si- gnaler des faits de harcèlement sexuel est une action honorable et courageuse. Quelle que soit la victime qui porte plainte officiellement, les institutions uni- versitaires devraient fournir des moyens dâaccéder aux services de soutien (ser- vices sociaux, soins de santé, services juridiques et professionnels). Ils doivent fournir des moyens alternatifs et moins formels permettant dâenregistrer des informations sur lâexpérience et de signaler lâexpérience si la victime nâest pas à lâaise à lâidée de porter plainte de manière formelle. Les institutions universi- taires doivent développer des approches pour éviter que la victime ne subisse, ou ne craigne, des représailles dans le cadre universitaire. RECOMMANDATION 7 : Sâefforcer de maintenir un leadership solide et hétérogène a. Les président·e·s, les recteur·e·s, les doyen·ne·s, la direction de dépar- tement et la direction de programme des établissements supérieurs et des universités doivent faire de la réduction et de la prévention du har- cèlement sexuel un objectif explicite de leur mandat. Ils doivent dé- clarer publiquement que la réduction et la prévention du harcèlement sexuel figureront parmi leurs principales priorités, et ils doivent faire participer les étudiant·e·s, le corps enseignant et le personnel â et, le
290 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES cas échéant, la communauté locale â à leurs efforts. b. Les établissements dâenseignement supérieur doivent soutenir et aider les dirigeant·e·s à tous les niveaux (université, école/ établissement supérieur, département, laboratoire) à développer des compétences en matière de leadership, de résolution des conflits, de médiation, de négociation et de désamorçage des conflits, et devraient veiller à une bonne compréhension des politiques et procédures de traitement des questions de harcèlement sexuel. En outre, ces programmes de déve- loppement des compétences doivent être adaptés à chaque niveau de direction. c. Les programmes de formation aux fonctions de direction destinés aux universitaires doivent inclure une formation sur la manière de recon- naître et traiter les questions relatives harcèlement sexuel, et sur la manière de prendre des mesures explicites pour créer une culture et un climat permettant de réduire et de prévenir le harcèlement sexuel, et pas seulement de protéger lâinstitution contre toute responsabilité. RECOMMANDATION 8 : Mesurer les progrès Les établissements universitaires doivent collaborer avec les chercheur·e·s pour évaluer et apprécier leurs efforts visant à créer un environnement plus diversifié, plus inclusif et plus respectueux, et mettre en place des politiques, des procédures et des programmes de formation efficaces. Ils ne devraient pas sâappuyer sur les rapports formels établis par les victimes pour comprendre le harcèlement sexuel qui sévit sur leur campus. a. Lorsque les organisations étudient le harcèlement sexuel, elles doivent suivre les méthodologies valables établies par la recherche en sciences sociales sur le harcèlement sexuel et doivent consulter des experts en la matière. Les enquêtes qui tentent de déterminer la prévalence et les types de harcèlement subis par les individus doivent adopter les pra- tiques suivantes : garantir la confidentialité, utiliser des instruments comportementaux validés, tels que le questionnaire sur les expériences sexuelles, et éviter dâutiliser spécifiquement le terme « harcèlement sexuel » dans toute enquête ou questionnaire. b. Les établissements dâenseignement devraient également procéder à des
7. Résultats, conclusions et recommandations 291 évaluations plus larges en utilisant des mesures en plus des enquêtes sur le climat du campus, pour lâanalyse des données, lâethnographie, les groupes de discussion et les entretiens de sortie. Ces méthodes sont particulièrement importantes dans les petites unités organisationnelles où les enquêtes qui nécessitent plus de participants pour produire des données significatives, pourraient ne pas être utiles. c. Les organisations qui étudient le harcèlement sexuel dans leur envi- ronnement doivent prendre en considération les expériences vécues par les personnes de couleur et les personnes appartenant à des minori- tés sexuelles et de genre, et elles doivent utiliser des méthodes qui leur permettent de ventiler leurs données en fonction de lâorigine raciale, ethnique, lâorientation sexuelle et lâidentité de genre pour refléter les différentes expériences des différentes populations. d. Les résultats des enquêtes sur le climat doivent être rendus publics pour encourager la transparence et la responsabilité, et pour montrer à la communauté du campus que lâétablissement prend la question au sérieux. Une des options évoquées serait que les établissements universitaires collaborent à la mise en place dâun fichier central per- mettant de communiquer leurs données sur le climat ambiant, ce qui pourrait également améliorer la capacité de recherche sur lâefficacité des approches institutionnelles. e. Les agences et fondations fédérales devraient engager des ressources pour développer un outil similaire à lâARC3, lâAdministrator Resear- cher Campus Climate Collaborative, afin de comprendre et de suivre le climat pour le corps enseignant, le personnel et les stagiaires post- doctoraux. RECOMMANDATION 9 : Provoquer le changement a. Les établissements dâenseignement doivent sâefforcer de demander des bourses dans le cadre du programme STEM Equity Achievement (SEA Change).3 3ââ Voir https://www.aaas.org/news/sea-change-program-aims-transform-diversity-efforts-
292 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES b. Les agences fédérales et les fondations privées doivent encourager et soutenir les institutions universitaires qui sâefforcent dâobtenir des prix SEA Change. Les organismes dâaccréditation doivent prendre en compte les efforts visant à créer des environnements diversifiés, inclusifs et respectueux lorsquâils évaluent les établissements ou les départements. c. Les agences fédérales doivent encourager les efforts visant à réduire le harcèlement sexuel dans le milieu universitaire, en exigeant dâévaluer lâenvironnement de recherche, en finançant la recherche et lâévalua- tion de la formation des étudiants et du corps enseignant (y compris lâintervention des témoins), en soutenant le développement et lâéva- luation de la formation au leadership pour le corps enseignant et en finançant la recherche sur les politiques et procédures efficaces. RECOMMANDATION 10 : Encourager lâimplication des organisations professionnelles et dâautres organisations a. Les organisations professionnelles doivent accélérer leurs efforts pour être considérées comme des organisations qui contribuent à modifier la culture du harcèlement sexuel et qui réduisent ou préviennent son apparition. Elles doivent apporter du soutien et prodiguer des conseils aux membres qui ont été victimes de harcèlement sexuel. Elles doivent user de leur influence pour lutter contre le harcèlement sexuel dans les communautés scientifiques, médicales et dâingénieurs quâelles repré- sentent, et promouvoir une culture professionnelle de civilité et de res- pect. Les efforts de lâUnion américaine de géophysique sont particu- lièrement exemplaires et devraient être considérés comme un modèle à suivre pour les autres organisations professionnelles. b. Les autres organisations qui facilitent la recherche et la formation des personnes dans les domaines de la science, de lâingénierie et de la médecine, comme les sites de collaboration sur le terrain (câest-à - stem.
7. Résultats, conclusions et recommandations 293 dire les laboratoires et observatoires nationaux), doivent établir des normes comportementales et définir des politiques, procédures et pra- tiques similaires à celles recommandées pour les institutions univer- sitaires, à lâinstar des organisations professionnelles. Ils doivent tenir les personnes pour responsables de leurs comportements lorsquâelles se trouvent dans leur établissement, quelle que soit leur affiliation ins- titutionnelle (comme le font certaines organisations professionnelles). RECOMMANDATION 11 : Engager des actions législatives Les législatures des Ãtats et le Congrès devraient envisager de nouvelles lois et des lois supplémentaires avec les objectifs suivants : a. Mieux protéger les demandeurs dewharcèlement sexuel contre les re- présailles. b. Interdire la confidentialité dans les accords qui permettent actuelle- ment aux harceleurs dâintégrer un autre établissement et de dissimuler les décisions passées. c. Interdire les clauses dâarbitrage obligatoires pour les plaintes pour dis- crimination. d. Permettre dâengager des poursuites immédiates contre les auteurs pré- sumés (à la place, ou en plus, de leurs employeurs universitaires). e. Obliger les institutions recevant des subventions fédérales à publier les résultats des enquêtes sur le climat dans les campus et /ou le nombre de rapports de harcèlement sexuel établis dans les campus. f. Demander à la National Science Fondation et aux National Institutes of Health de consacrer des fonds pour la recherche destinés à une analyse de suivi sur le sujet du harcèlement sexuel dans les sciences, lâingénierie et la médecine dans 3 à 5 ans afin de déterminer (1) si la recherche a montré que la prévalence du harcèlement sexuel a dimi- nué, (2) si des progrès ont été réalisés dans la mise en Åuvre de ces recommandations et (3) où concentrer les efforts futurs.
294 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES RECOMMANDATION 12 : Remédier aux manquements liés à lâapplication effective de lâinterdiction de la discrimination sexuelle prévue au Titre VII a. Les juges, les institutions universitaires â y compris le corps ensei- gnant, le personnel et les responsables universitaires â et les orga- nismes administratifs doivent se fonder sur des preuves scientifiques concernant le comportement des victimes et des auteurs de harcèle- ment sexuel lorsquâils évaluent à la fois la conformité de lâinstitution à la loi et le bien-fondé des plaintes individuelles. b. Les juges fédéraux devraient tenir compte de lâefficacité démontrée des politiques et pratiques de lutte contre le harcèlement telles que les formations, et pas seulement de leur existence, pour constituer une manière positive de se défendre contre une plainte pour harcèlement sexuel, en vertu du Titre VII. RECOMMANDATION 13 : Renforcer lâaction et la collaboration des agences fédérales Les agences fédérales doivent faire ce qui suit : a. Apporter davantage de soutien à la recherche et à lâévaluation de lâef- ficacité des politiques, des procédures et de la formation en matière de harcèlement sexuel. b. Sâoccuper du harcèlement sexuel avec, au moins, le même niveau dâat- tention et de ressources que celui consacré à lâinconduite en matière de recherche. Ils devraient renforcer la collaboration entre les bureaux qui supervisent lâintégrité de la recherche (câest-à -dire ceux qui sâoc- cupent des questions relatives à lâéthique, lâinconduite scientifique, la diversité et le harcèlement), centraliser les ressources, les informa- tions et les expertises, fournir davantage de ressources pour traiter les plaintes et travailler avec les victimes, et appliquer des sanctions aux chercheur·e·s reconnu·e·s coupables de harcèlement sexuel. c. Exiger des établissements quâils signalent aux agences fédérales les cas où des personnes bénéficiant de subventions ont été jugées coupables dâavoir enfreint les politiques en matière de harcèlement sexuel ou ont été mises en congé administratif pour cause de harcèlement sexuel,
7. Résultats, conclusions et recommandations 295 comme lâa proposé la National Science Foundation. Les agences de- vraient également tenir pour responsables lâauteur du harcèlement et lâétablissement, en recourant à une série de mesures disciplinaires qui limitent les effets négatifs sur les autres bénéficiaires de subventions à savoir les victimes du harcèlement, ou des témoins innocents. d. Récompenser les établissements dâenseignement supérieur et les universités, et les encourager à mettre en Åuvre des politiques, pro- grammes et stratégies qui, selon les recherches, sont les plus suscep- tibles de réduire et de prévenir le harcèlement sexuel et celles qui sâavèrent être les plus efficaces. RECOMMANDATION 14 : Mener les recherches nécessaires Les bailleurs de fonds doivent soutenir les recherches suivantes sur : a. Les expériences de harcèlement sexuel des femmes appartenant à des groupes sous-représentés et/ ou vulnérables, en particulier les femmes de couleur, les femmes handicapées, les migrantes, les femmes appar- tenant à des minorités sexuelles et de genre, les stagiaires en postdoc- torat et les autres. b. Les politiques, procédures, formations et interventions, en particulier leur capacité à prévenir et à faire cesser les comportements de harcèle- ment sexuel, à modifier la perception de la tolérance de lâorganisation à lâégard des comportements de harcèlement sexuel et à réduire les conséquences négatives de la déclaration des incidents. Ces actions doivent inclure des recherches sur les mécanismes de signalement for- mels et informels, la formation des témoins et des responsables uni- versitaires, la formation sur le harcèlement sexuel et la diversité, les interventions visant à améliorer la civilité, les exigences de signale- ment obligatoire et les approches visant à soutenir et à améliorer la communication avec les victimes. c. Les mécanismes de résolution de conflits orientés vers les victimes et les mécanismes par lesquels les victimes ont un rôle à jouer dans la décision de ce qui arrive à lâauteur, y compris les pratiques de justice restaurative. d. Les mécanismes de protection des victimes contre les représailles.
296 HARCÃLEMENT SEXUEL DES FEMMES e. Les approches permettant dâatténuer les effets négatifs pour les vic- times. f. Les facteurs de motivation permettant dâinciter les responsables des établissements dâenseignement supérieur à sâattaquer aux problèmes de harcèlement sexuel sur les campus. g. La prévalence et la nature du harcèlement sexuel dans des domaines spécifiques des sciences, de lâingénierie et de la médecine, et qui suivent les bonnes pratiques pour les enquêtes sur le harcèlement sexuel. h. La prévalence et la nature du harcèlement sexuel perpétré par des étu- diants au sein du corps enseignant. i. Le niveau de harcèlement sexuel dont les auteurs de harcèlement réci- divistes sont responsables. j. La prévalence et lâeffet du harcèlement ambiant dans le milieu univer- sitaire. k. Les liens entre les relations consensuelles et le harcèlement sexuel. l. Les caractéristiques psychologiques qui augmentent le risque de per- pétrer différentes formes de comportements de harcèlement sexuel. RECOMMANDATION 15 : Responsabiliser lâensemble de la communauté universitaire afin de réduire et prévenir le harcèlement sexuel Tous les membres des campus universitaires de notre pays â étudiants, sta- giaires, enseignants, employés et directeurs -, ainsi que les membres des sites de recherche et de formation, doivent assumer la responsabilité de promouvoir une éducation, une formation et des environnements de travail civils et respectueux, prendre des mesures à lâencontre et confronter ceux dont les comportements et les actions génèrent des environnements propices au harcèlement sexuel.